On veut qu'accumulant outrage sur outrage, D'un Dieu lent à frapper nous irritions la rage: Du moins nous péririons, et trompant son courroux, Nous devrions la mort au dernier de ses coups.
« La mort ! quel triste asile! Et qui, malgré ses peines, Par ses hideuses mains veut voir briser ses chaînes, Veut perdre pour jamais cette pure clarté, Cet esprit dont le vol parcourt l'immensité ; Et tomber, des splendeurs d'une vie immortelle, Dans le sein ténébreux de cette ombre éternelle, Où les sens, la pensée et l'être ne sont plus ? Et fût-ce un bien si grand de les avoir perdus, Ce Dieu d'anéantir notre affreuse existence Aura-t-il le pouvoir, aura-t-il l'indulgence? Son pouvoir est douteux, son refus est certain. Ce Dieu sage est-il fait pour un courroux sans frein? Ce Dieu, dont on connaît la puissance suprême, Maître de l'univers, l'est-il moins de lui-même ? Voudra-t-il tout à coup, par la haine emporté, Révoquer un arrêt que la haine a dicté;
Et, conduisant la mort dans ces brûlans abîmes, Se priver de sa proie et manquer de victimes?
«Pourquoi donc, disent-ils, craindre des chocs nouveaux? Peut-il rien ajouter à l'excès de nos maux?
Eh quoi ! dans ce palais où leur chef les rassemble,
Siéger, délibérer, et conspirer ensemble,
Est-ce l'excès des maux ?... Rappelez-vous ce jour Où, chassés par ce Dieu du céleste séjour, Contre les traits brûlans du foudre inévitable Nous invoquions l'abîme où son bras redoutable En foule nous plongeait dans ces gouffres affreux.
The deep to shelter us? this Hell then seem'd A refuge from those wounds; or when we lay Chain'd on the burning lake? that sure was worse. What if the breath, that kindled those grim fires, Awak'd, should blow them into seven-fold rage And plunge us in the flames? or, from above, Should intermitted vengeance arm again His red right hand to plague us? What if all Her stores were open'd, and this firmament Of Hell should spout her cataracts of fire, Impendent horrors, threatening hideous fall One day upon our heads; while we perhaps, Designing or exhorting glorious war, Caught in a fiery tempest shall be hurl'd Each on his rock transfix'd, the sport and prey Of wracking whirlwinds; or for ever sunk Under yon boiling ocean, wrapt in chains; There to converse with everlasting groans, Unrespited, unpitied, unrepriev'd,
Ages of hopeless end? This would be worse.
« War therefore, open or conceal'd, alike My voice dissuades; for what can force or guile With him, or who deceive his mind, whose eye Views all things at one view? He from Heaven's heighth All these our motions vain sees, and derides;
Not more almighty to resist our might
Than wise to frustrate all our plots and wiles.
Shall we then live thus vile, the race of Heaven,
Parlez, n'étiez-vous pas alors plus malheureux ? Et si ces feux vengeurs allumés par sa haine, Redoublant de fureur, redoublaient notre peine; S'il rallumait sa foudre, et du trône des airs Faisait pleuvoir sur nous un déluge d'éclairs; Enfin, pour épuiser ses trésors de vengeance, Si ce ciel infernal, de qui la voûte immense Prête à nous accabler de ses débris affreux, Suspend sur notre tête un océan de feux, S'écroulait, nous versait ses flammes dévorantes, Des torrens de l'enfer cataractes brûlantes... Que dis-je ? en ce moment où nos hardis complots De ce Dieu qui nous voit menacent le repos, Au milieu des projets qu'il se plaît à confondre, Peut-être ici sur nous un orage va fondre, Et sur ces rocs aigus nous attacher vivans, En proie à la tempête et battus par les vents; Ou du lac enflammé roulant sur nous les ondes, Nous plonger enchaînés sous ces vagues profondes, Gouffre horrible, habité par les pleurs, les sanglots, Où jetés sans pitié, sans retour, sans repos, Nous n'aurons devant nous qu'un théâtre de gêne, Qu'un abîme de maux et des siècles de peine !
« Quels qu'ils soient, croyez-moi, laissons là les combats.
De ce terrible Dieu nous connaissons le bras.
En vain nous emploierons ou la force ou l'adresse : Eh! contre ce Dieu fort que peut notre faiblesse? Pouvant tout, réglant tout, voyant tout d'un coup d'œil, Des hauteurs de sa gloire il rit de notre orgueil; Non moins grand pour braver la force audacieuse Qu'habile à démêler la ruse insidieuse.
Quoi donc nous, fils du ciel, habiter les enfers!
Thus trampled, thus expell'd to suffer here
Chains and these torments? better these than worse, By my advice, since fate inevitable
Subdues us, and omnipotent decree, The victor's will. To suffer, as to do, Our strength is equal, nor the law unjust That so ordains: this was at first resolv'd, If we were wise against so great a foe
Contending, and so doubtfull what might fall. I laugh, when those who at the spear are bold And venturous, if that fail them, shrink and fear What yet they know must follow, to endure Exile, or ignominy, or bonds, or pain, The sentence of their conqueror : this is now Our doom; which if we can sustain and bear,
« Our supreme foe in time may much remit His anger; and perhaps, thus far remov'd, Not mind us not offending, satisfied
With what is punish'd; whence these raging fires Will slacken, if his breath stir not their flames.
Our purer essence then will overcome
Their noxious vapour, or, inur'd, not feel;
Or chang'd at length, and to the place conform'd In temper and in nature, will receive
Familiar the fierce heat, and void of pain;
This horror will grow mild, this darkness light; Besides what hope the never-ending flight
Of future days may bring, what chance, what change Worth waiting; since our present lot appears
Plier la tête au joug, tendre les mains aux fers! Eh bien, aimez-vous mieux appesantir vos peines? Vaincus, soumettons-nous; captifs, portons nos chaînes; C'est l'arrêt du destin, c'est la loi des vainqueurs : Tout oser, tout souffrir appartient aux grands cœurs ; Nous en avons la force, ayons-en le courage.
De quel droit se plaint-on? nos maux sont notre ouvrage ; Nous devions les prévoir, quand bravant le hasard Notre orgueil contre Dieu déploya l'étendard. Je ris, quand je vois ceux dont la haute vaillance Affrontait les combats, redouter la souffrance, L'exil, l'ignominie, et tous ces maux enfin Dont les droits de la force ont fait notre destin.
Que sais-je ? désarmé par notre obéissance, Ce Dieu peut quelque jour adoucir sa vengeance, Et, satisfait des maux que nous avons soufferts, Nous oublier un jour dans un coin des enfers. Craignons, en répétant ce défi téméraire, D'éveiller à la fois ses feux et sa colère;
Ses feux s'amortiront; nos êtres plus parfaits De leurs noires vapeurs craindront moins les effets ; Le temps adoucit tout; la puissante habitude Rendra ce ciel plus pur, et ce climat moins rude; Nous-mêmes, pour ces lieux prenant des sens nouveaux, D'un œil moins effrayé nous verrons ces tombeaux ; Et, rendant à nos yeux son horreur familière, L'enfer aura son charme, et la nuit sa lumière. Voilà mon espérance. Eh! comptez-vous pour rien
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